Albert DELSTANCHE

1870-1941

par Jean-Paul Goldschmidt-Clermont

Albert Delstanche descend d'une famille de médecins originaire de Marbais. Son grand-père, Félix Delstanche, était médecin des prisons et aide-major de l'artillerie bruxelloise comme chirurgien à la révolution de 1830. Son père, Charles Delstanche a fondé la société belge de laryngologie et d'otologie et enseignait ces disciplines à l'Université Libre de Bruxelles.

1870 - Par sa mère, A.D. était le petit-fils de Jean-Baptiste Madou. Il naît à Bruxelles le 8 mai 1870. Son don inné pour le dessin éclôt dès l'enfance et il produit sa première estampe en classe de poésie à l'athénée d'Ixelles en 1885.
Malgré un penchant pour la médecine, il poursuit des études de droit à l'U.L.B., obéissant en cela aux vœux paternels. Il est promu docteur en droit en 1891 avec la plus grande distinction.
Un "pro deo", unique plaidoirie, malgré un grand succès, lui amènera beaucoup de tracas. Inscrit au barreau en 1894 il ne portera la robe que jusqu'en 1902.

1895 - Il épouse Madeleine Vanderborght, qui, très douée pour les arts elle-même, l'encourage à quitter le barreau et à suivre sa vocation d'artiste. Naissent deux filles, Marie-Madeleine et Isabelle. Ce "quatuor" familial restera très soudé jusqu'à la mort de l'artiste.

1899 - A.D. se perfectionne à l'académie des Beaux-Arts à Düsseldorf. Il devient l'élève à l'académie de Bruxelles d'Alexandre Robert et de Josef Stallaert.
Licencié en art et archéologie à Bruxelles, il professe plusieurs années au musée des Beaux-Arts. A.D. passe ensuite l'examen d'entrée du personnel scientifique de la Bibliothèque Royale où il entre comme volontaire en 1903.

1904 - Il est nommé attaché au Cabinet des Estampes. Il publie alors quelques articles : "Pierre Caron, relieur gantois du XVIe siècle" dans la revue des bibliothèques et archives de Belgique, "un incunable de la xilographie imprimée sur une reliure", "la lithographie en Belgique" et "la gravure à l'exposition de l'art du XVIIe siècle" dans le bulletin mensuel de la chambre syndicale des imprimeurs en 1910.

1907 - Il imprime ses premières eaux-fortes (cf. le moulin de Put).

1908 - A.D. fait un long voyage d'étude en Italie avec sa femme. Ses fonctions administratives lui pèsent de plus en plus, et il demande à être mis en disponibilité.
Alors son talent se libère (cf. vue de Beersel). Il fait des essais approfondis de "vernis mous". Il grave ses premiers bois à Oudenbourg, en Flandre maritime, où il séjourne très souvent.

1914 - L'exil en Angleterre. Il devient responsable à Londres de la communauté du "Arts club", puis travaille avec le Ministère belge des Sciences et des Arts sous la direction de Paul Lambotte. Il remplace Jules Destrée comme secrétaire du Comité pour les artistes belges en exil. Il est en relation et aide ainsi, par exemple : Alfred Bastien, Adrien Blomme, Emile Claus, Valerius de Saedeleer, Jean Delville, Hyppolite Daye, Emile Fabry, Marcel Jefferys, Georges Minne, Constant Permeke, Victor Rousseau, Scoufflaire, C.Sturbelle, Léon Tumilaire, G. Van de Woestyne, Prosper Colpert, Edgard Tytgat, Eugène Ysaïe, etc ...
Il est aussi employé au War Department de mars 1916 à juin 1919 comme "postal censor" pour les lettres en allemand, hollandais, français, italien et espagnol!
A.D. maintient aussi son activité artistique durant cette période. D'Emile Verhaeren, également en exil, il illustre "The little towns of Flanders" en 1916.
Avec Charles De Coster "The legend of Tyl Ulenspiegel" et "Flemish legends".
A.D. est également en étroites relations avec Maurice Maeterlinck, Séverin Sterckmans, Pierre Paulus, Waegemans et Boy le Mayeur pour lequel il plaide en anglais devant le lord-maire de Londres !

1919 - Enfin libéré de ses devoirs patriotiques, il crée ses monotypes qui seront offerts après sa mort au Cabinet des Estampes de Bruxelles par ses filles.

1920 - A.D . fait un séjour chez son ami Jean Vanden Eeckhoudt à Roquebrune.

1923 - Il se consacre à l'eau-forte, la pointe sèche, le dessin à la plume et au roseau, au lavis, et restera fidèle à ces techniques jusqu'à la fin de sa vie.

1927 - Il grave surtout des eaux-fortes inspirées par la mer, et illustre "La route d'Emeraude" d'Eugène Demolder (bois et eaux-fortes).

1929 - Il se fixe à Ohain pour y travailler jusqu'en 1940. Il fournit une intense production de lavis à la sépia et à l'encre de Chine ainsi que d'eaux-fortes inspirées principalement par la campagne brabançonne et par ses petits-enfants.

1940 - Il est appelé par l'Académie Royale de Belgique à faire partie de la classe des Beaux-Arts comme membre correspondant de sa section de gravure.

1941 - Mort de l'artiste.

Albert Delstanche était de cette catégorie d'artistes qui n'avaient pas vraiment besoin de vendre pour vivre, et qui ne voulaient pas confondre art et commerce. Les quelques expositions qu'il a faites se résument comme suit:

au Centre artistique et littéraire en 1920, 1924, 1927, 1930 et 1933

à la galerie Charlet (av. Louise) en 1925

au Palais des Beaux-Arts en 1925 et 1938

en groupe à Amsterdam en 1925 (exposition belge de noir et blanc).

Après sa mort, plusieurs expositions ont perpétué sa mémoire:

1942: rétrospective au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles
1943 et 1955: exposition au Palais des beaux-Arts
1961: exposition à la galerie Val du Chêne à Ohain
1965: exposition à la galerie Cheval de Verre à Bruxelles
1972: exposition à la Bibliothèque Royale de Bruxelles
1978: exposition à la galerie Van Loo à Bruxelles
1992: exposition "Hommage à Albert Delstanche" à l'International Art Gallery à Lasne
1998: exposition à l'International Art Gallery à Lasne
2011: exposition à la galerie Patrick Lancz à Bruxelles
2019: exposition à la galerie Patrick Lancz à Bruxelles

et en groupe:
1948: "La gravure belge contemporaine" en Pologne et en Uruguay
1970: "Demi-siècle d'art en Brabant wallon" à Nivelles.

monotype: épreuve d'une composition peinte sur verre ou métal tirée à la presse comme une gravure en taille douce alors que la couleur est encore fraîche. Il s'agit donc le plus souvent d'épreuves uniques.

A voir aussi:
l'article de Paul Poirier (Le Soir, 1967)
l'article de Jean-Robert Delahaut (Terres Latines, 1933)
l'article de Henri Lavachery (Extrait de l'Annuaire de l'Académie royale de Belgique, 1950)
l'article de Claire Coljon (Le Soir, 2011)